Big George Eddy in da place !

Publié le par Coach Dav

 Voici une interview de Mister George publiée dans l'excellent magazine "Reverse" n°5 ! Je vous encourage à lire cette interview intéressante en attendant de pouvoir publier la mienne un jour...

ELU A 64,8%
MEILLEUR COMMENTATEUR !!!
C'est un véritable plébiscite : lors du sondage que nous avons organisé sur basketsession.com, 64,8% de nos internautes ont désigné George Eddy meilleur commentateur basket de France. Une surprise ? Pas vraiment. Canal étant la seule grande chaîne non câblée à diffuser du basket-ball, il partait avec un avantage par rapport à certains de ses camarades. Et puis ... et puis Big George nous a tous fait découvrir le basket US et notre amour pour le basket lui est forcément redevable. Alors, écoutons Monsieur Eddy.
[Résultats du sondage : George Eddy 64.8%, Jacques Monclar 14.5%, Xavier Vaution 5.3%, Richard Dacoury 3.4%, David Cozette 3.4%, ...]

Reverse : Qu'est-ce que ça te fait d'être élu commentateur préféré à 64,8% des 2200 votants pour le sondage de basket-session.com ? C'est presque un score de dictateur, non ?
George Eddy : (II rit) Ca serait le cas si j'avais bourré les urnes !... Je suis surpris, car ce site est plutôt représentatif de la mouvance playground, le streetball, And1. Avec mes presque 50 ans, et mon passé de basketteur pro, je ne représente pas trop ce mouvement là mais je n'ai rien contre car j'aime tous les baskets. J'ai d'ailleurs joué beaucoup sur les playgrounds. Et en plus sur le forum de ce site, on m'a souvent critiqué, parce qu'au bout de vingt ans, les gens en ont marre d'entendre la même personne.
R : C'est quoi, commenter ?
G.E : Une des premières choses qu'on apprend, c'est que c'est comme si on est autour d'un verre avec un copain et qu'on discute du match. Parce que, même s'il y a des milliers de téléspectateurs, c'est comme si, au travers de la télé, on parlait directement à chacun. C'est ça, le but du jeu.
R : Comment prépare-t-on un match de basket que l'on va commenter ?
G.E : Les gens pensent que c'est facile. Mais il y a derrière un vrai travail de fond.
Je passe trois heures par jour uniquement à naviguer sur les sites de basket et à lire les journaux. Ensuite, il faut préparer des fiches, des stats. En moyenne, pour chaque match, j'ai trois infos ou anecdotes prêtes pour chaque joueur du cinq majeur de chaque équipe, il faut penser qu'à chaque fois que le jeu s'arrête, qu'un joueur est à l'écran, il faut apporter de l'info, et surtout mettre la bonne parole sur la bonne image.
R : Pour chaque match, tu dois donc accumuler un véritable bottin...
G.E : Oui et non (II montre un bloc d'une cinquantaine de pages photocopiées). Car en fait, en étant immergé dans le basket ainsi, 85% des infos sont déjà dans ma tête avant chaque match.
R : Comment faisais-tu avant Internet ?
G.E : C'était difficile de se renouveler, j'avais tendance à toujours raconter les mêmes anecdotes. Nos sources étaient essentiellement les journaux américains, USA Today ou les petite infos qui nous étaient livrées avec les cassettes américaines. Il arrivait qu'on commente un match dix jours après leur diffusion ! Aujourd'hui, c'est un peu le contraire, c'est une question de tri. On a tellement de sources, les sites des journaux US, nba.com... Il y a trop d'infos, trop de matches à la tv...
R : Beaucoup de personnes connaissent George Eddy, le personnage médiatique, plus que le basket lui-même. Ca te fait quoi ?
G.E : C'est vrai qu'à une époque, il m'est arrivé dans des salles de Pro A, de signer plus d'autographes que certains joueurs eux-mêmes. C'est pas très important. Mais ça montre qu'à une époque, il y avait un impact NBA- Canal + qui nous mettait en avant.
R : Parfois, à 4 heures du mat', en direct à l'antenne, quand le match n'a plus d'enjeu, tu arrives encore à donner l'impression d'être à donf. Avec Xavier, vous vous dopez, ou quoi ?
G.E : Non, ma méthode est simple. Avant les matches de la nuit, je dors trois heures, je prend un thé, et je viens. Après le match, je redors trois heures. Et la journée suivante... je suis dans le coltard. Surtout que ma fille veut jouer avec moi dès le matin. Mais forcément, dans ce métier, il y a des contraintes. Deux mois par an, pour les déplacements, je suis loin de ma famille. C'est le prix du rêve.
R : Quel type de basket préfères-tu commenter ?
G.E : Le plus excitant est toujours de commenter du direct, parce qu'on ne connaît pas le résultat à l'avance, on ne peut pas anticiper. On vit vraiment l'événement. Le top, c'est évidemment, en plus, quand tu es sur place. La Finale NBA ou les JO, c'est le summum. Ensuite, c'est plus agréable si le match est de qualité et qu'il y a un enjeu bien sûr. Je préfère commenter un Dallas - Détroit qu'un Washington - Orlando. Enfin, je préfère le jeu d'attaque. Après, peu importe que ce soit de l'Euroleague ou de la NBA, ou de l'excellence régionale, du moment que c'est du beau basket.
R : La question que se posent beaucoup de gens sur ton accent américain : est-ce que tu le cultives ?
G.E : Non. Je pense avoir maintenant le même accent que tout à l'heure, à l'antenne. J'en ai assez que certains résument ma carrière à ça ou pensent que c'est grâce à ça que j'ai percé. Après vingt ans, heureusement, la plupart des gens sont conscients ou s'aperçoivent qu'il faut un peu plus que ça pour faire un bon commentateur de basket. Je n'ai jamais fait comme Jane Birkin, qui faisait des fautes de français exprès pour se faire remarquer.
R : Ta plus belle expérience de commentateur ?
G.E : Les premiers directs ont été un éblouissement. Le premier Superbowl, la première finale, entre Jordan et Magic, les JO de Barcelone...
R : Un moment embarrassant...
G.E : Une fois, aux débuts de Canal, on avait commenté un match de Foot US. En régie ils fumaient des pétards, et la première image qu'on avait balancée dans la retransmission, c'était celle du score final. On avait été obligés de meubler pendant trois minutes, le temps qu'ils rembobinent la cassette, et commenter le match quand même. On passait pour des amateurs...
R : Quelques grands matches que tu as commentés...
G.E : J'ai été tellement gâté qu'on pourrait en choisir chaque année. Le dernier match 7 de la Finale NBA, parce que c'est rare. France-Grèce, en demi-finale de l'Euro, malgré la déception et la défaite. La France en finale à Sydney face aux Etats-Unis...
R : Le match le plus chiant...
G.E : Ca doit remonter à l'époque de Maljkovic à Limoges, le basket grec, turc, qui s'inspirent des méthodes yougoslaves, où il n'y a aucune envie de construire, où ' on cherche à pourrir le jeu de l'adversaire, on gère les 24 secondes en attaque par rapport à la défense... C'était comme disait Tapie, l'enjeu qui primait sur le jeu.
R : Tes jeux de mots sont mondialement connus. C'est de l'improvisation ?
G.E : II m'arrive d'en noter quelques-uns sur un papier, mais la plupart du temps, c'est improvisé.
R : La personnalité basket que tu as préféré interviewer dans ta carrière ?
G.E : Jordan. A l'époque du magazine New Sport. C'était avant le phénomène planétaire, en 1991 pour sa venue à Paris. Après il y a des champions de la gentillesse, des gens qui vous répondent de manière intelligente, sans arrogance, comme Ginobili, Boris Diaw, Mike D'Antoni... Mais là ce n'est pas le basketteur, mais l'homme qui transparaît.
R : La plus grosse ordure ?
G.E : Reggie Miller est très arrogant et désagréable. Rasheed Wallace est lunatique, on peut lui dire n'importe quoi, on ne sait pas ce qu'il va répondre. Larry Brown aussi. Lui, aux derniers JO, dès qu'il me voyait lever la main pour poser une question, il soupirait, parce que j'avais critiqué son managérat, le fait qu'il ne fasse pas plus jouer les jeunes et que Donnie Nelson, qui connaît très bien le basket international, n'ait pas été considéré pour un poste d'assistant.
R : As-tu des idoles, des modèles pour tes commentaires ?
G.E : Tout mon style, dès le début, je l'ai copié sur les grands commentateurs américains, comme Chick Hearn, qui était un mythe aux Lakers. Il a inventé beaucoup d'expressions, comme slam dunk, que j'ai reprises ou dont je me suis inspiré pour mon boulot en France. Il était capable de commenter à la fois pour la télé et pour la radio, et il a continué jusqu'à 83 ans ! C'était un génie (*). Sur le foot US, il y avait John Madden, qui a reçu tous les trophées de meilleur commentateur pendant des années. En fait, j'ai essayé de picorer chez tous les meilleurs Américains, leur onomatopées, leur enthousiasme, le dosage. En France, j'ai beaucoup apprécié Roger Couderc, à qui on me comparait beaucoup au début de ma carrière.
R : Et que penses-tu des commentateurs américains d'aujourd'hui ?
G.E : Bill Walton me fatigue, avec son côté « c'était mieux avant. Quand je jouais avec les Blazers ou avec Larry Bird... » Pourtant il est compétent. Mais il n'est pas vraiment drôle. Doug Collins est pro, mais lui aussi n'est pas très drôle. Steve Kerr a un bon potentiel. Barkley, j'aime bien son côté rentre-dedans, son franc-parler, son humour, mais il ne fait pas de matches, uniquement des émissions d'analyse, de commentaire.
R : Penses-tu à quelqu'un d'autre que l'on ait pas évoqué ?
G.E : A Thierry Roland. Mais parce que j'ai toujours voulu être l'anti-Thierry Roland. Il représentait lui-même l'«anti-Canal», il nous a taillés dans un livre. J'ai toujours voulu être plus tolérant et moins franchouillard. D'ailleurs, je ne dis pas ça parce que je n'aime pas TF1. Aujourd'hui, ce que font Thierry Gilardi et Arsène Wenger, je trouve ça très bien. Guy Roux aussi, avant qu'il ne rejoigne Canal, trouvait grâce à mes yeux parce qu'il avait, un peu comme Barkley, ce côté drôle, mais compétent.
R : Pour intéresser les Français à la Pro A, que faire ? Te remettre au commentaire ?
G.E : George Eddy au commentaire, ce n'est pas la panacée ! J'ai déjà commenté de la Pro A. Ce sont les différentes directions qui étaient déçues des audiences constatées. On était en concurrence avec le rugby, et on a fini par se faire bouffer par le rugby. Mais
à l'époque, un match de Coupe d'Europe avec Limoges ou un ASVEL - Pau pouvait attirer jusqu'à 20% des abonnés. On n'était pas si largués.
R : Tu continues à jouer au basket, encore aujourd'hui. A quel rythme ?
G.E : Deux entraînements par semaine au stade Coubertin, avec les « Canal Bulls », et un match le dimanche matin en championnat seniors division 1 avec Le Vésinet.
R : Une rumeur court, selon laquelle tu aurais tendance à t'en prendre, parfois (souvent ?) à tes coéquipiers sur le terrain. Certains disent que tu es carrément un très mauvais perdant. Tu confirmes ?
G.E : Je confirme, des fois, je pète un câble. Mais a posteriori, je m'en veux toujours beaucoup. C'est plus fort que moi, et quand je perds les pédales, je m'auto-flagelle pendant deux jours. En fait la plus grande force de ma personnalité est aussi ma plus grande faiblesse. Avec le déficit de physique que j'ai à la base, je n'aurais jamais pu être basketteur professionnel pendant quinze ans si je n'avais pas ce feu à l'intérieur de moi-même pour le basket, qui a parfois engendré des débordements dans mon comportement sur le terrain. D'ailleurs, j'ai été viré de première division à Paris à trente ans, parce que je mettais trop de pression sur les joueurs.

(*) Chick Hearn, après une carrière de 42 ans, est décédé à l'âge de 85 ans

Interview et photos issues du magazine Reverse n°5 mai-juin 2006  --  Sondage réalisé sur basketsession avec 2172 votants.

Publié dans Quand on aime - ...

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